
Je m’appelle Gaelle et j’ai 45 ans, je suis suivie pour un cancer du sein depuis le 18 novembre 2021. Je suis maman de 3 enfants qui ont aujourd’hui 20, 17 et 10 ans et j’ai un mari formidable qui l’était déjà avant tout ça.
Les premiers signes du cancer sont apparus chez moi un peu avant l’été 2021 bien sûr sans que je sache qu’il s’agissait de ça, je crois que depuis toujours le mot cancer m’effrayait, il planait au-dessus de ma famille, parents, oncles, tantes, cousine et faisait des dégâts. J’ai remarqué une petite fossette sur mon sein gauche, le genre de fossette que l’on trouve mignonne sur le visage mais disgracieuse sur le sein, elle s’est accentuée pendant l’été mais dans mon maillot de bain je l’ai ignorée. Puis la rentrée est arrivée avec tout le tourbillon qui la transporte, le boulot, les activités sportives des enfants, les courses, le ménage, les repas entre amis bref une vie remplie et j’ai laissé de coté cette vilaine fossette.
Octobre rose s’annonçait et le covid menaçait, peut être le mélange de ces deux « grandes tendances » m’ont inconsciemment guidé chez mon médecin, je lui ai dit que je toussais un peu et je lui ai montré furtivement ma fossette et Patatra tout s’est emballé, ce que je pensais juste moche était en fait un signe du cancer du sein.
Est-ce que je l’ai compris tout de suite ? Non, une prise de sang, une mammographie, une échographie plus tard je commence à comprendre ce qui se passe puis vient la biopsie, le médecin qui la réalise est désagréable et ne me ménage pas « que voulez vous que ce soit madame ! il faut réserver un bloc tout de suite, c’est un cancer ! » alors ma vie s’arrête, je ne dors plus, je ne mange plus, je ne souris plus, je pleure, je pleure, je pleure. L’attente des résultats est longue, plus de 10 jours et enfin mon docteur me contacte, les résultats sont négatifs, pas de cancer dans les prélèvements… ouf…mais mon docteur n’aime pas ces résultats et veut qu’on refasse tout- non ce n’est pas possible la biopsie ne peut pas être ratée, c’est leur job, c’est trop grave de louper ça !– On me propose d’attendre 1 à 2 mois pour recommencer mais je ne peux pas et je contacte un institut de cancérologie près de chez moi, j’obtiens un RDV en 48h. Je refais la biopsie dans la douleur, physique et émotionnelle, le moment est lourd mais adouci par le personnel, la secrétaire m’offre même un petit chocolat sorti d’une boite secrète qui me fait légèrement sourire, puis revient l’attente des résultats toujours aussi longue.
Le 18 novembre 2021, j’ai RDV avec un chirurgien de l’institut, il vient en train de paris et je dois le voir à 9h, mais il a raté son train et je l’attendrai jusqu’à 11h avec mon mari dans la salle d’attente, je me souviens de chaque minute de cette attente, puis enfin je suis dans son bureau, il y a du monde, le chirurgien, une infirmière, une psy, la secrétaire et nous, je suis suspendu à ses lèvres, il est confus de son retard, cherche ses codes d’ordinateur et fini par se tourner vers nous, il pose ses mains sur le bureau et il dit : « Madame, vous avez un cancer du sein ». Voilà c’était un RDV d’annonce dans toute sa splendeur. Il a un visage rassurant mais le sol se dérobe sous mes pieds, mon monde s’effondre et je répète sans cesse – donc j’ai un cancer – les larmes coulent sur nos visages, le chirurgien veut nous expliquer qu’il y des solutions, des traitements mais nous n’entendons plus rien. Moi je vois la mort, le cercueil, les larmes des miens, la tristesse dans les yeux de mes enfants, de mes parents. J’aurais voulu ne jamais avoir cette fossette, j’aurais voulu savoir qu’il s’agissait d’un signe du cancer du sein mais non j’étais ignorante, c’était comme si le mot cancer prenait tout son relief et me montrait toutes ses subtilités et ses détails que finalement nous ne connaissons pas.
C’était une catastrophe, j’étais l’ombre de moi-même.
Je dois l’annoncer à tout le monde, à mes enfants, ce sera très dur mais avec beaucoup d’amour, à mes autres proches ça sera par téléphone entre des sanglots puis aux autres, amis, travail, connaissances, un sms indiquant – hello, j’ai un cancer…- serait suffisant, parce que trop éprouvant….
Je ne mange toujours pas et je pleure toujours autant, je passe du temps à regarder mes enfants, m’imprégner de leurs images au plus profond de moi, j’ai l’impression de faire les choses pour la dernière fois et je m’en veux de ne pas avoir su profiter plus fort de chaque seconde de ma vie et de leur vie. Sur les conseils d’amies, je fréquente une association « centre ressource » où je rencontre des femmes comme moi, souvent plus âgées mais je comprends à travers leur expérience qu’il n’y a pas d’âge, que le cancer ne fait pas de distinction, qu’il est malin, qu’il attaque tout le monde et qu’il prend plusieurs formes, en résumé qu’il est bien « pourri ». Je décide de le personnaliser pour mieux le combattre, ce n’est pas mon cancer c’est le cancer, lors de ma chirurgie, je demande au personnel médical présent d’insulter copieusement ce cancer lorsqu’ils l’auraient sorti de moi, ce qu’ils ont fait avec plaisir en trouvant la demande assez loufoque, à mon réveil, ils étaient fiers de me répéter les insultes qu’ils lui avaient envoyé !
C’était le début d’un long protocole de soins qu’il allait falloir subir parce que, oui, la chimio est à vomir, les rayons brûlent la peau et l’hormonothérapie vous détraque pour plusieurs années mais ce sont nos alliés et c’est grâce à eux que je peux témoigner aujourd’hui. Je ne sais pas si j’ai envie de détailler ma période de soins parce que c’est vraiment une période difficile où l’image de soi prend un sacré coup, amaigri, affaibli, sans cheveux, un peu comme éteinte il faut quand même trouver la force de remonter et prendre conscience que l’avenir est devant nous, que tout ça doit avoir un sens, que cela doit servir au plus grand nombre. Apprendre à reconnaitre les signaux d’alertes, comprendre que nous ne sommes pas seul, moi, j’ai la chance d’avoir un mari qui a porté notre famille à bout de bras tout du long et encore maintenant, il m’a accompagné pour chaque chimio et même s’il n’était pas tout prés de moi pendant les cures, il m’attendait dans la voiture et m’accueillait avec ce sourire aimant et rassurant que j’aime tant et comme chaque chimio était une épreuve « réussie » j’avais droit à un petit cadeau à chaque fois– petit flacon d’huile essentiel pour passer les nausées, petit coussin de massage pour les douleurs du dos, argile blanc pour faire des masques sur ma tête devenue chauve…-il a toujours su adoucir les moments les plus durs- MERCI- comprendre que dire Je t’aime à ses enfants fait du bien et avancer avec confiance.

Aujourd’hui, je suis fatiguée, transformée par les épreuves, je ne retravaille pas encore, bientôt un an d’arrêt mais je suis en VIE, octobre rose 2022 est là et je voudrai que mon histoire aide le plus grand nombre parce que le mot CANCER fait peur mais on peut le briser comme on casse une coquille pour voir à l’intérieur les petits signes qui éviteraient tous ces longs protocoles. Un cancer détecté plus tôt à de meilleurs pronostics, faites vous dépister, n’attendez pas, n’hésitez pas !

Commentaires (10)
Bouleversant et touchant à la fois!
Bravo pour ce dur parcours!
Merci d’avoir pris le temps de lire <3
Quel beau témoignage ! J’en ai eu des frissons à le lire .. bravo pour votre parcours .
Merci pour votre passage 🙂
Merci pour le partage d’émotions ❤️ et bravo Mélissa pour ces photos superbes comme toujours
Merci à toi Amélie d’avoir pris le temps de venir par ici… 🙂
Bravo pour votre parcours, pour se partage.
Merci à Melissa de prendre de son temps pour ce mois d’octobre rose.
Merci à toi Sabrina, d’avoir pris du temps pour m’écrire ton histoire, et de la partager avec d’autres. ❤️
Bouleversant témoignage. Les larmes coulent d elles même…
Courage
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